La grande femme

La grande femme est la conceptualisation d'une saine radicalité. Il arrive bien un moment dans l'existence où l'on doit choisir avec le précieux bénéfice de l'expérience entre la contemplation et l'action, ce qui s'appelle devenir un homme. Penser est difficile et c'est pourquoi les gens jugent très bêtement et injustement les vies des autres. Penser est difficile et c'est pourquoi cette paire de chaussures adaptée à mes pieds se devra d'être particulièrement douée dans le processus de pensée. Penser est difficile et c'est pourquoi elle ne devra pas limiter son horizon à la complétude d'être normale et pouvoir se distinguer de la meute par son imagination culturelle.

La grande femme se devra de respecter mon monde spirituel, artistique et pour lui éviter toute tentation de venir opprimer ma liberté de l'ambition ainsi que mon potentiel créatif, elle se devra de posséder et de cultiver en toute liberté son propre monde ambitieux, riche, puissant et affirmé de valeurs. Ce que les autres pensent de nous et comptent faire de nous sont souvent la plus terrible et la plus courante des contraintes sinon injuste sanction sur notre capacité à vouloir/pouvoir nous réaliser, à combattre radicalement. L'enfer, ce sont les autres et elle se devra de se distinguer radicalement d'eux par son extrême mérite de ne pas épouser la sinistre logique de cet étouffement à petit feu faisant rage dans de trop nombreux couples sur le charme de nos individualités.

La grande femme, avant même la survenance du sceau de l'amour, se devra d'être avant tout une très solide amitié irréprochable. Elle se devra d'être l'un de ces forts rares esprits hypersensibles à l'intelligence éminemment très supérieure au psychisme bien‐fondé, un brin romantique, rompus aux fins discernements et analyses dans un océan de finesse, de livres, de poèmes, de proverbes et d'adages. Elle devra être capable de comprendre et de respecter mes phases périodiques de solitude, d'introspection nécessaires au façonnement de mes idées propres rendant une vie si digne d'être vécue. Elle se devra d'être cet attachement si franc et si grand qu'elle y sera dans le secret bien gardé de mes entrailles. Elle sera de ces personnes n'étant pas confinées dans un horizon spirituel trop étroit et ne se contentant pas de réponses inadéquates ou fausses aux questions de la vie.

La grande femme respirant la fougue de (tout) connaître, sera dominée par une vie intense se reconnaissant par son contenu et sa signification bien plus large, tout à fait contraire à la simple recherche étriquée sans inventivité de l'insignifiante quête de la position, du mariage, de la réputation, du succès extérieur de l'argent, caractérisant ces personnes sans saveur restant malheureuses et névrosées même quand elles ont atteint ce qu'ils cherchaient. C'est dans cette radicalité sartrienne d'un existentialisme sans compromis que se dessine le portrait robot de cette femme incroyable, la vraie femme, cette femme de choc surfant largement au‐dessus des vagues de la médiocrité.

La grande femme ne se cherche pas, elle s'attend. 
La providence du futur suffira à trancher ce problème.