La bête noire
Depuis le début de l'année 2020, elle est la bête noire. La première vague fut terrible ; pas un masque pour se distancer, plus un lieu ouvert, plus la moindre personne dans les rues : une patrie entière à l'arrêt, la vieille Europe qui s'enferme, le monde qui n'en croit pas ses yeux comme ses oreilles avec quelques grands continents qui se croient tout d'abord épargnés, avant de sombrer dans les mêmes scénarios. Dans les lueurs d'un printemps presque fini et dans les chaleurs d'un été presque idéal, la bête noire s'était presque fait oubliée. Il fut presque impossible dans les premières nouvelles inconsciences de septembre d'en deviner l'intensité de son retour fulgurant. Dans les brumes d'octobre, elle a nouvellement frappé de toute sa netteté numérique. Novembre, il fallut comprendre dans nos masques que la moindre cendre aléatoire de la bête noire ne s'arrête finalement pas aux portes d'un voile et que l'accalmie sociale de décembre serait un leurre quand les chiffres ne baissent finalement si peu. Dans des fioles réfrigérés, l'espoir vient de l'autre côté de l'atlantique. C'est le vent d'un nouveau souffle que l'on souhaite durable, précisément aiguillé dans les êtres les plus vulnérables mais que nous réserve encore la bête noire pour janvier, quand nous aurons laissé quelque-peu la lumière entrer dans divers cœurs autour du sapin et du feu d'un solstice d'hiver si populaire ?